Rouen : 5 visites historiques à ne pas manquer !
Fondée sur la rive droite de la Seine sous le règne d’Auguste, Rotomagus (nom romain de Rouen) doit sa prospérité aux échanges commerciaux réalisés grâce au fleuve. Deuxième ville la plus importante de Gaule, après Lyon, elle devient capitale du duché de Normandie en 843, avec l’installation du chef viking Rollon.
Son influence ne cesse de croître au Moyen Âge, avec l’accession, à la tête du duché, de Guillaume le Conquérant, au XIe siècle. En prenant la couronne anglaise, le duc de Normandie entraîne Rouen et la région toute entière dans une succession sans fin de conflits entre les royaumes de France et d’Angleterre.
Découvrez l’histoire passionnante de cette ville de commerce, tiraillée entre deux couronnes, en visitant cinq monuments incontournables de la métropole de Rouen !
Le Donjon de Rouen, dernier témoin du château de Rouen
À quelques pas de la gare SNCF, au détour d’une rue bâtie d’immeubles d’habitations, ne manquez pas le dernier vestige du château médiéval de la ville : le Donjon de Rouen.
Imaginez : 10 tours imposantes, dont le donjon est la plus importante, une enceinte polygonale et des fossés secs de plusieurs mètres… Le château de Rouen, construit entre 1204 et 1210, par le roi Philippe Auguste, apparaît comme une forteresse imprenable. Érigée sur la colline de Bouvreuil, à l’emplacement de l’ancien amphithéâtre gallo-romain, la citadelle domine la cité et ses environs
Maquette de reconstitution du château de Rouen © Histoires de patrimoine
Haut lieu de pouvoir, ce château est, à la fois, siège de l’Échiquier de Normandie, (assemblée des notables de la région), siège du Bailliage, siège de la Vicomté de Rouen et résidence royale ! Place stratégique, ce château joue un rôle majeur dans la guerre de Cent Ans opposant les troupes françaises et anglaises.
Jeanne d’Arc, capturée à Compiègne, est enfermée dans la Tour de la Pucelle, dont il ne reste aujourd’hui que quelques pierres. Durant sa captivité, elle est questionnée et menacée de torture dans le Donjon, avant d’être condamnée pour hérésie et brûlée vive, le 30 mai 1431, sur la place du Vieux-Marché.
Tour Jeanne d'Arc, Donjon de Rouen © Histoires de patrimoine
L’histoire mouvementée du monument se poursuit au XVIe siècle, au cours des guerres de Religion. La forteresse cristallise les affrontements entre protestants et catholiques, qui se disputent le contrôle de la ville. Fortement endommagée, elle est abandonnée au début de l’année 1591 avant de tomber dans l’oubli et d’être démantelée au cours des siècles, au profit de l’urbanisation galopante.
Avec ses 30 mètres de haut et ses murs de plus de 4 mètres d’épaisseur, le Donjon résiste. Inscrit monument historique dès 1840, il bénéficie d’une restauration au cours de laquelle sont reconstruits le 3e étage, le chemin de ronde en bois ainsi que la toiture en poivrière.
Au XXe siècle, le Donjon de Rouen reprend sa place dans les conflits guerriers. Occupé par l’armée allemande, il est transformé en bunker avec un dôme en béton armé coulé sous sa charpente.
Réouvert au public depuis 2017, il permet aux visiteurs d’explorer son histoire au travers d’escape games historiques ! Jusqu’au 5 novembre 2023, plongez-vous dans la peau de résistants infiltrés dans le bunker allemand pour saboter leurs actions…
Des visites et événements culturels sont également organisés toute l’année pour découvrir le monument autrement !
Pour en savoir plus sur le Donjon de Rouen.
Décors de l'Escape Game « Libérez Rouen ! » au Donjon de Rouen © HIstoires de patrimoine
L’Historial Jeanne d’Arc, vivre le mythe autrement
L’histoire de Rouen est intimement liée à celle de Jeanne d’Arc. Après avoir foulé les mêmes pierres qu’elle au Donjon de Rouen, découvrez l’Historial Jeanne d’Arc, au sein de l’ancien palais archiépiscopal gothique, accolé à la cathédrale de Rouen.
Pour tout comprendre du personnage de Jeanne d’Arc, de son histoire et de son rôle clef dans la guerre de Cent Ans, l’Historial Jeanne d’Arc vous propose un parcours immersif, au cœur du XVe siècle.
Remontez le temps pour découvrir l’enquête captivante menée par Jean Juvénal des Ursins, archevêque de Reims et maître d’œuvre du second procès de Jeanne d’Arc.
En 1456, soit 25 ans après l’exécution de La Pucelle, un second procès, innocente et réhabilite la jeune femme. 23 témoins reprennent l’ensemble des faits, de sa jeunesse à Domrémy, à sa condamnation au bûcher, 19 ans plus tard.
Historial Jeanne d'Arc au palais archiépiscopal de Rouen © Histoires de patrimoine
En passant de salle en salle, au fil des témoignages des personnalités entendues dans la procédure, la véritable histoire de Jeanne d’Arc se révèle sous vos yeux. Celle d’une jeune femme envoyée, selon ses dires, par les saints Michel, Marguerite d'Antioche et Catherine d'Alexandrie, pour secourir le royaume de France et qui parvient à inverser le cours de la guerre de Cent Ans.
Capturée en 1430, elle est vendue aux Anglais. Après des mois de rétention et d’interrogatoires dans le château de Rouen, elle est jugée et brûlée vive pour hérésie.
Historial Jeanne d'Arc au palais archiépiscopal de Rouen © Histoires de patrimoine
Mais l’histoire de Jeanne d’Arc ne s’arrête pas là ; après le procès de 1456, elle devient une véritable héroïne. Après avoir suivi son histoire, un second espace met en évidence la construction de son mythe au cours des siècles.
Films, tablettes, historiens virtuels et cabinet de curiosités permettent aux visiteurs de tout comprendre sur le rôle stratégique de ce récit, que ce soit dans l’histoire de la République française, ou de l’Église.
Une plongée palpitante dans la vie de l’un des personnages les plus emblématiques de notre histoire vous attend !
L’Aître Saint-Maclou, joyau insolite
Arpenter l’Aître de Saint-Maclou c’est parcourir plus de 600 ans d’histoire de Rouen. Tout commence au XIVe siècle, alors que la ville est en proie à la guerre, aux famines et à la Peste noire. Arrivée par le sud de la France dès 1347, cette épidémie frappe lourdement Rouen l’année suivante.
Dans la paroisse très peuplée de Saint-Maclou, le petit cimetière de l’église ne peut plus accueillir toutes les victimes. Il est donc décidé de fonder un second cimetière un peu plus loin. Par opposition au « petit aître » situé contre l’église, le nouveau cimetière est appelé le « grand aître ».
Issu du latin atrium, ce terme désigne, à l’époque romaine, la cour intérieure d'une villa. Ce nom est ensuite donné à la cour qui précède l’église, souvent transformée en cimetière. C’est ainsi, qu’au Moyen Âge, le mot aître est employé pour nommer un cimetière.
Aître Saint-Maclou à Rouen © Histoires de patrimoine
Au XVIe siècle, de nouvelles épidémies frappent Rouen et le manque de place se fait à nouveau sentir dans le cimetière. Entre 1526 et 1533, trois galeries sont élevées, autour de l’aître Saint-Maclou, afin de servir d’ossuaires. Les ossements sont déterrés du cimetière pour être placés, à la vue de tous, dans des greniers ajourés. Les colonnes de pierres soutenant ces galeries sont ornées d’un décor particulier : une danse macabre.
Ce motif, très répandu dans l’Europe du XVe siècle, présente des personnages, dans une ronde entraînée par un squelette personnifiant la mort.
Ici, chaque colonne est ornée d’un homme, attiré par un squelette, contre son gré, dans la danse macabre.
Sur la galerie Est, des hommes d’églises sont ainsi entraînés dans la danse infernale quand, sur la galerie Ouest, sont figurés des laïcs.
Cette danse macabre est surmontée, sur les poutres des combles, de deux frises aux motifs rappelant également la mort : crânes, outils de fossoyeurs ou encore instruments liturgiques sont sculptés dans le bois.
Détail du décor de l'Aître Saint-Maclou © Histoires de patrimoine
Au milieu du XVIIe siècle, est élevée l’aile sud de l’aître Saint-Maclou. Elle abrite des prêtres qui donnent une nouvelle fonction au lieu. Une école pour les garçons pauvres de la paroisse est fondée, en 1661. Les petites filles sont rapidement accueillies à leur tour.
Cette activité éducative anime les lieux pendant plus de 120 ans en recevant des enfants toujours plus nombreux. Mais à la fin du XIXe siècle, le développement de l’instruction laïque met un coup d’arrêt à l’institution : en 1907, l’école ferme. Elle est remplacée, quatre ans plus tard par un pensionnat de jeunes filles.
Il faut attendre 1940 pour que l’aître de Saint-Maclou renoue avec sa vocation de lieu d’apprentissage. Les galeries médiévales deviennent le siège de l’école des Beaux-Arts de Rouen et le reste jusqu’en 2014.
Galerie d'Art dans l'Aître Saint-Maclou © Histoires de patrimoine
Intégralement restauré par la Métropole Rouen Normandie, à partir de 2016, l’aître Saint-Maclou a retrouvé ses lettres de noblesse. Ouvert au public tous les jours, il est désormais animé par une vocation de partage et de diffusion du patrimoine.
Un audioguide vous permet de plonger dans l’histoire de ce monument insolite grâce à un dialogue imaginé entre le fossoyeur et le chat de l’aître.
L’édifice accueille également la Galerie des Arts du Feu, ainsi qu’une seconde galerie consacrée à l’art contemporain. Il offre ainsi, aux visiteurs, une parenthèse hors du temps, entre histoire et culture.
Chaque année pendant les vacances de Toussaint, l’aître Saint-Maclou s’anime de nombreux événements au cours des Fêtes Macabres. En 2023, célébrez El Dia des los Muertos au cœur de la Normandie !
La Maison Sublime de Rouen, plus ancien monument juif de France
Le Palais de Justice de Rouen est un bâtiment majestueux, à l’architecture gothique flamboyante grandiose. Mais c’est bien sous ce monument que nous vous invitons à vous rendre, à 2,50 mètres sous la chaussée actuelle, pour découvrir la Maison Sublime.
Palais de Justice de Rouen © Histoires de patrimoine
Cet édifice, découvert par hasard, dans les années 1970, à l’occasion de fouilles préventives, est un splendide héritage de l’histoire de Rouen et de sa communauté juive. Située au cœur du quartier juif médiéval, le long de l’actuelle rue aux Juifs, la Maison Sublime doit son nom à un graffiti en hébreu tiré du Livre des Rois stipulant « Et cette maison sera sublime jusqu’à ce que le Rocher ait pitié de Sion ».
Graffiti sur le mur du sous-sol de la Maison Sublime © Histoires de patrimoine
Bâti au tout début du XIIe siècle, cet édifice de style roman, en pierre de calcaire, de 14 mètres de long et 9,5 mètres de large était probablement composé de 3 niveaux (sous-sol semi enterré, rez-de-chaussée surélevé et premier étage). Il s’agit du plus ancien monument juif découvert en France !
La Maison Sublime atteste de l’importance de la communauté hébraïque à cette période à Rouen, même si sa fonction reste incertaine. Habitation privée, synagogue, école talmudique, voire les 3 à la fois, le débat reste ouvert entre les scientifiques. Les 16 graffitis en hébreu évoquant des prénoms, ou reprenant la citation du Livre des Rois, visibles sur les murs, ne permettent pas de trancher.
Sous-sol de la Maison Sublime de Rouen © Histoires de patrimoine
Dès le XIIIe siècle, les Juifs voient leur liberté de circuler et de commercer se restreindre, et ce dans toute la France. Interdiction d’habiter à la campagne, interdiction de pratiquer l’usure (prêt à intérêt), obligation de porter un signe distinctif, les contraintes se multiplient jusqu’à ce que leur expulsion de France soit ordonnée par Philippe le Bel, en 1306.
La Maison Sublime semble pourtant avoir subsisté après cet événement, elle aurait été détruite vers 1429 ou 1550.
Ce site singulier, à l’abri des regards, a été mis au jour, fouillé et dégagé, en 1976, puis classé monument historique, l’année suivante. La crypte archéologique permettant la visite a été inaugurée au début des années 1980. Fermée au public à la suite des attentats du 11 septembre 2001, et pendant de nombreuses années, la Maison Sublime a été restaurée en 2018 pour rouvrir au public en 2022.
Façades nord et ouest de la Maison Sublime de Rouen © Histoires de patrimoine
Le Château de Robert le Diable, une forteresse au cœur de la légende
À 25 kilomètres en aval de Rouen, le château de Robert le Diable, situé à Moulineaux, est l’un des monuments les plus mystérieux de la région.
Probablement érigée au XIe siècle, en plein cœur de la Normandie Ducale, cette forteresse n’est attestée, par un écrit, qu’en 1180. Elle a pour fonction de protéger l’accès à Rouen, dans un système de verrou organisé avec Château-Gaillard et le château de la Roche-Fouet. Les rois anglais Richard Cœur de Lion et Jean sans Terre auraient fait fortifier l’édifice et y auraient entreposé des vivres.
Château de Robert le Diable à Moulineaux © Histoires de patrimoine
Démantelé par les Anglais, entre 1203 et 1204, lors de la reconquête de la Normandie par Philippe Auguste, le château est relevé par le roi de France. Il subit plusieurs fois les affres de la guerre de Cent Ans aux XIVe et XVe siècles.
Au printemps 1418, les troupes anglaises avancent sur les terres normandes. Afin d’éviter qu’elles ne jouissent de la place stratégique du château, Charles VI ordonne sa destruction immédiate. L’édifice, réduit à l’état de ruines, plonge alors dans une longue période d’oubli, il devient au fil des siècles un repaire de brigands.
Au XVIIIe siècle, l’intérêt pour les ruines du château donne un second souffle au monument. C’est à partir de cette époque que le lieu est associé à la légende de Robert le diable et confère son nom actuel au site. Pourtant, aucun lien réel ne lie le château au personnage mythique dont l’apparition remonte au XIIe siècle.
Château de Robert le Diable © Histoires de patrimoine
Selon la légende, l’épouse d’un duc de Normandie qui ne parvenait pas à concevoir aurait noué un pacte avec le Diable afin de donner naissance à un garçon. L’enfant, nommé Robert, aurait fait preuve d’une extrême cruauté dans sa jeunesse, multipliant les méfaits dans la région. Mais, découvrant son origine satanique, il aurait décidé de faire pénitence à Rome où le Pape lui conseille de vivre en ermite et d’agir comme un fou. À cette période, Rome est attaquée par des pillards ; un mystérieux chevalier vêtu de blanc sauve la cité des envahisseurs. Découvrant l’identité de ce bienfaiteur, Robert, l’empereur lui aurait proposé la main de sa fille et un royaume. Mais Robert aurait refusé ces honneurs pour retourner vivre en ermite.
La figure de Robert le Diable semble pouvoir être inspirée de plusieurs personnalités historiques ayant réellement existé : Rollon, premier duc de Normandie, ayant pris le nom de Robert après sa conversion au christianisme, Robert le Magnifique, père de Guillaume le Conquérant, Robert de Courteheuse, son fils ou encore des seigneurs locaux, mais aucun ne concorde exactement avec Robert le Diable !
Histoire terrible et merveilleuse de Robert-le- Diable - 1848 Pellerin & Cie, Épinal - Gravure sur bois coloriée au pochoir © musée de l'Image – Ville d’Épinal / cliché E. Erfani
Grâce à cette légende, largement diffusée au XIXe siècle, le château dit de Robert le Diable suscite de nombreuses curiosités. Un industriel de la région, Oscar Cosserat, achète les ruines en 1903 et reconstruit partiellement l’édifice avec le concours de l’architecte Lucien Lefort.
Devenu, dans les années 1950, un musée consacré aux Vikings et à l’histoire de la Normandie, un drakkar est même reconstitué dans la cour du château. Temporairement fermé en 2004, il est racheté par la Métropole Rouen Normandie, en 2007.
Réhabilité et à nouveau ouvert aux visiteurs, en été, il y est proposé un Explor Game qui plonge le public dans l’histoire rocambolesque du château et de la Normandie. Une expérience étonnante, entre aventures fantastiques et récits historiques.
Château de Robert le Diable © Histoires de patrimoine
Découvrez toute la programmation du Château de Robert le Diable !
Article réalisé en partenariat avec Rouen Normandie Sites & Monuments