Les Cadets de Gascogne, toute une histoire
Les Cadets de Gascogne font partie des plus illustres héros des romans de cape et d’épée. Mais ils ne sont pas que de simples êtres de papier, les Cadets ont réellement existé.
Plongez dans l’histoire d’une tradition régionale qui a su marquer l’histoire de France au point d’en influencer la langue !
« Cadet », un mot à double sens
« Œil d’aigle, jambe de cigogne, Moustache de chat, dents de loups, Fendant la canaille qui grogne, Œil d’aigle, jambe de cigogne, Ils vont, coiffés d’un vieux vigogne Dont la plume cache les trous ». C'est ainsi qu'Edmond Rostand décrit le fameux régiment des Cadets de Gascogne « Tous plus nobles que des filous » dans son œuvre Cyrano de Bergerac.
Mais quel lien existe-t-il entre les Cadets de Gascogne et la signification du mot éponyme ? Dans le langage courant un « cadet » signifie « Qui est né ou née après un autre frère ou une autre sœur » (source : Littré).
Cette définition, qui semble bien lointaine d'un nom de soldat ou de troupe militaire, prend pourtant racine dans l'histoire de ces Cadets de Gascogne.
Les aînés et les puinés, une tradition de Gascogne
Jusqu’au XVe siècle, les frères et sœurs sont divisés en un aîné, terme issu de l’ancien français « ain » signifiant « avant » et des puînés, mot venant de « puis et né ». À l’époque, les principes de succession divisent généralement l’héritage entre les enfants. Toutefois, le titre et la majorité des biens reviennent au premier garçon né, selon le droit d’aînesse.
Mais dans la province gasconne, la règle est tout autre : le chef de famille désigne un unique héritier de l’ensemble des titres et des biens afin d’assurer la continuité de la maison et d’éviter le morcellement du patrimoine.
L’enfant choisi est le plus à même de porter la succession, ce n’est pas forcément le premier-né ni même un garçon. Par exemple, c'est ainsi que Jeanne d’Albret, mère d’Henri IV devient l’héritière du roi de Navarre.
Cette pratique laisse de nombreux puînés sans ressource, en particulier des jeunes hommes. Ces Gascons entreprennent alors une carrière dans les armes et se mettent, pour la plupart, au service du roi afin de subvenir à leurs besoins.
Du cadet de la famille au Cadet de Gascogne
Ces capitaines ou « capdets » en gascon, puis « cadets », sont souvent nobles, et sans le sou. Mais grâce à leur audace, ils acquièrent rapidement une certaine renommée.
Parmi les cadets célèbres, on compte Savinien de Cyrano de Bergerac ou le comte d'Artagnan, deux héros de romans de cape et d'épée.
La notoriété des « Cadets de Gascogne » finit par prendre une telle ampleur que la signification de « puîné » leur est associée et le terme « cadet » prend petit à petit sa place dans le langage courant.
Véritable héros de la littérature française, Cyrano de Bergerac, personnage célèbre d'Edmond Rostand interprété par Daniel Sorano, a marqué profondément notre culture.
D’Artagnan, le plus illustre Cadet de Gascogne
D’Artagnan, célèbre mousquetaire d’Alexandre Dumas a réellement existé. Bien que le récit des Trois Mousquetaires tienne, en grande partie, de l’affabulation, le personnage principal incarne à merveille la situation des Cadets.
Pour forger la personnalité de son héros, Alexandre Dumas s’inspire des Mémoires apocryphes rédigées par Gatien de Courtilz de Sandras, en 1700. Ce texte, composé 27 ans après la mort de son protagoniste, relate la vie d’un certain Charles de Batz-Castelmore, comte d’Artagnan.
Bien que postérieures à l’époque décrite et empruntes de fiction, ses épopées dépeignent le destin du jeune noble provincial sans héritage.
Le véritable d’Artagnan naît entre 1611 et 1615, dans le comté de Fezensac (dans le Gers actuel). Il est le fils de Bertrand de Batz, seigneur de Castelmore et de Françoise de Montesquiou, deux modestes bourgeois agrégés à la noblesse dans la seconde moitié du XVIe siècle.
En tant que quatrième fils d’une fratrie de sept enfants, il quitte le château de Castelmore et embrasse la carrière militaire. Il consacre ainsi sa vie au service des rois de France, Louis XIII et Louis XIV.
D’abord cadet dans la compagnie des Essarts du régiment des Gardes française, il devient mousquetaire du Roi vers 1644. Peu à peu, d’Artagnan gagne la confiance de Louis XIV. Il accompagne le couple royal jusqu’à Saint-Jean-de-Luz lors de leur mariage, en 1660 et se fait confier la délicate arrestation de Nicolas Fouquet en 1661.
Souvent au front, il est tué le 25 juin 1673 vers Maastricht, durant la guerre menée contre les Provinces-Unies. Son parcours, bien que glorieux, est un parangon des destins sinueux réservés à ses jeunes hommes sans le sou : les Cadets de Gascogne.
Les Trois Mousquetaires ©Adobe