Mandeure : sur les traces du plus grand théâtre antique des Gaules
Classé monument historique depuis 1964, le théâtre de la ville de Mandeure est le plus grand théâtre antique des Gaules. Ce vestige est un des monuments majeurs de la vaste agglomération gallo-romaine qui s’étendait sur les communes actuelles de Mandeure et de Mathay.
Situé au cœur du Pays de Montbéliard, dans le Doubs, cet édifice constitue un véritable centre de recherches archéologiques. Ouvert au public, il étonne les visiteurs par sa taille monumentale.
Partez à la découverte d'un des bâtiments antiques les plus réputés et plongez dans l'histoire d’Epomanduodurum.
Théâtre antique de Mandeure ©Aérodyne
À la découverte d’Epomanduorum
Pour retrouver les origines du théâtre gallo-romain de Mandeure, il convient de replonger en Antiquité, à la recherche d’Epomanduodurum. Cette cité, bâtie par les Séquanes, est le point de départ de la Mandeure que nous connaissons aujourd’hui.
Dès son apparition au Ier siècle av. J.-C. et son apogée atteinte au IIe siècle de notre ère, cette ville, située en Germanie supérieure, s’étend sur presque 200 hectares.
Epomanduodurum profite d’une position stratégique, entre les Vosges et le Jura, au carrefour de plusieurs voies commerciales de grande ampleur. Aussi, elle se trouve au point de rencontre de la route reliant le nord au sud de l’Europe et la voie fluviale allant du Doubs à la Méditerranée.
Cette localisation avantageuse lui permet de devenir une ville commerciale de premier plan, dont l’importance est attestée par un port fluvial sur les berges du Doubs. Possédant de grands entrepôts, appelés horrea, il se développe en même temps que la cité.
Fortement influencée par l’architecture romaine, Epomanduodurum, présente tous les traits caractéristiques d’une cité gallo-romaine prospère : un réseau de rues orthogonal, des établissements thermaux et un grand sanctuaire structurent la ville. Le temple de près de 30 hectares, est dédié, durant l’époque gauloise, à un dieu guerrier, avant d’être consacré à Mars, au cours de l’époque impériale romaine.
Un axe monumental traverse la ville. Il est constitué du sanctuaire, d’une esplanade de 200 mètres de long et du théâtre antique, d’une richesse historique exceptionnelle, qui domine la cité.
Théâtre de Mandeure ©Office de Tourisme du Pays de Montbéliard
Le plus grand théâtre antique des Gaules
Avec une longueur de 142 mètres et un rayon de 78 mètres, le théâtre gallo-romain de Mandeure apparaît comme le théâtre antique des Gaules ayant la plus grande superficie. Cette envergure majestueuse dissimule une organisation architecturale complexe.
Un premier bâtiment est érigé, sous le règne de l’empereur Claude, dans la première moitié du Ier siècle de notre ère. Il est, par la suite, agrandi, sous le règne des empereurs Flaviens viens, entre 69 et 96 apr. J.-C. Il faut attendre le IIe siècle pour que le théâtre se dote de sa colossale silhouette.
À chaque reconstruction, l’édifice gagne en diamètre, atteignant ses dimensions définitives sous la dynastie des Sévère, entre la fin du IIe et le début du IIIe siècle. Alors à son apogée, le théâtre présente deux façades semi-circulaires de 30 mètres de hauteur, ce qui est remarquable pour l’époque.
Au centre, un dispositif scénique composé entre autres, de planches de bois et d’un bâtiment de scène, accueille les comédiens lors de représentation.
Leur jeu peut ainsi être admiré par plus de 17 000 spectateurs assis sur quatre rangées de gradins en face de la scène. Cette composition très aboutie atteste de l’importance du bâtiment dont l’envergure en fait le plus grand théâtre antique connu des Gaules.
Théâtre de Mandeure ©Office de Tourisme du Pays de Montbéliard
Un lieu de cérémonies religieuses et de spectacles
Doté d’une acoustique de grande qualité et d’une capacité d’accueil gigantesque, le théâtre de Mandeure est utilisé, à l’époque gallo-romaine, aussi bien pour des spectacles que pour des cérémonies religieuses. Nos connaissances sur les divertissements romains restent parcellaires, cependant, des combats de gladiateurs, chasses, performances de mimes ou de pantomimes sont attestés.
Cette enceinte monumentale est également utilisée, durant l’Antiquité, comme lieu de cérémonies. Aussi, le théâtre accueille des processions venues du grand temple pour participer à un banquet rituel. En effet, la fresque retrouvée dans la villa romaine de Meikirch, en Suisse, figure une procession arrivant au théâtre d'Epomanduodurum, après avoir procédé au sacrifice d’un animal.
Des vestiges de cuisines et d’un puits, découverts à l’arrière de l’édifice confirment l’utilisation religieuse du théâtre gallo-romain. Mais ce site, d’une grande richesse, n’a pas fini de livrer tous ses secrets.
Théâtre de Mandeure ©Office de Tourisme du Pays de Montbéliard
Un site archéologique historique
Dès la fin du XVIe siècle, les racines antiques de Mandeure attirent l’attention d’érudits, architectes et archéologues. La cour des Wurtemberg, alors en place à Montbéliard, est propice à la mise en œuvre de projets archéologiques. C’est à cette époque qu’Epomanduodurum est identifiée pour la première fois.
Cette découverte historique est rendue possible grâce au travail de deux hommes : Jean Bauhin et Heinrich Schikhardt. Le premier, médecin et botaniste, met au jour le nom de la cité antique, tandis que le second, architecte de profession, entreprend les premières fouilles et publie la première description d’Epomanduodurum.
Le théâtre gallo-romain fait rapidement l’objet d’un traitement particulier. En effet, ce site est fouillé systématiquement de 1817 à 1820, par Frédéric Morel-Macler, architecte employé par Montbéliard. Inscrit dans la liste des monuments historiques par Prosper Mérimée, cette construction bénéficie d’une protection pour sauvegarder ses richesses.
Théâtre de Mandeure © Aérodyne
Au fil des recherches, le théâtre attise l’intérêt des érudits locaux qui, rassemblés dans la Société d’Émulation de Montbéliard, poursuivent et publient les travaux de Mérimée. Cette persévérance permet d’étudier avec minutie le théâtre antique de Mandeure, faisant de cet édifice l’un des rares établissements de ce type convenablement étudiés de l’époque. Il est même désigné comme un modèle exemplaire des théâtres de Gaule et de Germanie par Arcisse de Caumont, l’inventeur de l’archéologie monumentale française.
Les fouilles du site antique se poursuivent au fil des siècles prenant, parfois, des formes surprenantes. Aussi, au cours du XXe siècle, Paul Parrot, professeur au lycée technique de Montbéliard, profite des retenues de ses élèves pour les emmener sur le site de fouilles. Bien que le lieu ait été dégradé par une fouille radicale, menée à l’aide de pelles mécaniques, les élèves sortent de terre plusieurs vestiges.
Le théâtre antique de Mandeure, site historique de premier plan, exalte les historiens, archéologues et érudits locaux comme nationaux, tous éblouis par sa monumentalité. Pour tout comprendre de l’édifice et de son histoire, les chercheurs s’ingénient à reconstituer ses structures disparues.
Une partie des vestiges exhumés sont, aujourd'hui, conservés et exposés au musée du château des ducs de Wurtemberg.
Artefacts découverts au théâtre de Mandeure exposés au musée du château des ducs de Wurtemberg à Montbéliard © Jack Varlet
Pierre Mougin, 40 ans de découvertes
Embauché comme archéologue de collectivité par les villes de Mandeure et Mathay, Pierre Mougin veille depuis 40 ans sur le colosse de pierres. Dès ses plus jeunes années, il se passionne pour les vestiges historiques. Il adhère, vers l’âge de 10 ans, au club d’archéologie de Maîche, sa ville natale du Doubs. Fasciné, il rejoint la faculté d’archéologie de Besançon.
Peu enclin à regagner les troupes de soldats, il réalise son service militaire en Comté, comme archéologue rattaché au service régional d’architecture. C’est dans les années 1980 qu’il foule, pour la première fois, ce lieu qu’il considère comme sa deuxième maison : le théâtre antique de Mandeure.
Menant d’abord des fouilles préventives dans le cadre de travaux d’utilité publique, Pierre Mougin tombe sous le charme du théâtre et du sanctuaire romains. Depuis, cet amoureux d’histoire antique remonte le temps dans ces vestiges millénaires pour mettre au jour le fonctionnement de la cité gallo-romaine et de ses trésors. Une conception vivante de la recherche, qui fait renaître de ses ruines la grande Epomanduodurum endormie.
C'est lors d'une de ses campagnes que de fouilles qu'est découvert, en 2018, un dernier mur rajoutant 7 mètres au rayon du théâtre. Il devient ainsi le plus grand théâtre antique des Gaules et des Germanies, devant le théâtre antique d'Autun.
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