La grande rose de la Cathédrale de Reims
Communément appelée « Rose » et pourtant sa vaste ouverture oculaire dominant le parvis principal, sa position altière et la richesse de son décor statuaire et de vitraux l’assimilent d’avantage à un œil.
Un œil divin, tant convoité par les désirs ardents de reconnaissance mystique des rois de France. Car c’est ici que se sont succédés 33 couronnements, de Louis le Pieux à Charles X.
Une légitimité qu’obtient Reims de sacrer nos rois grâce à la détention de la Sainte Ampoule. Huile bénite qui aurait servi lors du baptême de Clovis le 25 décembre 498, dans un baptistère dont les vestiges sont aujourd’hui enfouis sous la cathédrale.
Et tel un regard, la grande rose de la cathédrale située sur sa façade occidentale - comme il est de coutume au nom du triomphe de la lumière sur les ténèbres - est emprunte de sens.
En premier lieu sa forme géométrique, le cercle, est symbole d’éternité, puisque ni commencement ni fin.
Il se compose de 12 pétales au nom des 12 apôtres et des 12 tribus d’Israël.
Coïncidence divine (?), son diamètre est également d’environ 12 mètres, unité de mesure dont l’invention est largement postérieure (1791).
Comme bien souvent, l’architecture religieuse est un livre ouvert. Elle allie Histoire et symboliques, passant de la narration à la contemplation.
La cathédrale de Reims ne déroge pas à cette règle.
C’est dans ce (saint) esprit que trois thèmes principaux composent la façade de la rose: « Il faut s’intéresser aux thèmes entourant la rose pour en comprendre le sens (…) comme toujours au Moyen Âge les symboliques sont riches » souligne Patrick Demouy, médiéviste Rémois.
Sur le portail central, le couronnement de la vierge assisté par les anges est à l'honneur cohabitant avec le thème christologique.
Ils sont représentés par une riche ornementation statuaire, et représentent deux thèmes fondamentaux de l’architecture religieuse pour les pays judéo-chrétiens.
La troisième thématique, royale, est spécifique à la cathédrale de Reims. Elle est en accord avec sa vocation et son usage. Pour en marquer la singularité, elle se lit verticalement, comme pour rompre avec la lecture religieuse du reste de la façade. On y découvre le sacre des rois d’Israël David et Salomon et le combat de David et Goliath, métaphore du combat contre le mal. Fort rappel que le roi est un nouveau David, symbole d'une royauté sacrée par excellence dans le nouveau testament.
Non loin, une longue galerie de rois entoure le baptême de Clovis. Légitimes témoins ancestraux de l'homme venu recevoir la couronne de France.
Détail de la galerie des rois de Reims
La rose, objet, entre 2014 et 2016, d'une minutieuse rénovation suite aux détériorations de la Première Guerre mondiale, est à la croisée de ces grandes thématiques.
Elle symbolise la pureté dans laquelle Marie, sous forme de vitraux, est représentée comme la première ressuscitée et offre la promesse d'une vie éternelle.
Comme pour convaincre les plus sceptiques, elle est entourée des statues représentant les pèlerins d’Emmaüs, témoins de la résurrection du Christ.
Et c'est le Christ en personne qui, au dessous de la rose et sous forme de statuaire, couronne sa mère. Rappelant ainsi au commun des mortels que le pouvoir légitime ne peut venir... que d'en haut!
Pour en savoir plus sur le chantier de rénovation de la Grande Rose, découvrez la vidéo ci-dessous.