Nélie Jacquemart, femme et collectionneuse d'exception
Nélie Jacquemart est un personnage fascinant de la fin du XIXe siècle.
Issue d’un milieu modeste, elle se hisse, par son talent et son goût, dans les hautes sphères de l’art et des milieux parisiens. Elle accumule, au cours de sa vie, une collection exceptionnelle.
À sa mort, sur le modèle du duc d’Aumale et de son domaine de Chantilly, elle lègue à l’Institut de France sa collection et deux écrins remarquables : l’hôtel particulier parisien du Boulevard Haussmann (musée Jacquemart-André) et l’abbaye de Chaalis dans l’Oise.
Nélie est née Cornélie Jacquemart en 1841. Elle est rapidement prise sous la protection de Madame de Vatry qui possède alors l’Abbaye de Chaalis. Grâce à son appui, Nélie rentre à l’école de peinture des Beaux-arts où elle est une des premières femmes à être acceptées.
Elle se spécialise rapidement dans le portrait mondain. Grâce à ses relations, elle peint le Tout-Paris jusqu’au président de la République lui-même, Adolphe Thiers.
Le Salon de Madame de Vatry à Chaalis en 1856, aquarelle d'Eugène Lami
Conservée à l'abbaye de Chaalis
Un mariage de passionnés
C’est ainsi qu’elle est sollicitée par Édouard André, banquier richissime, afin de lui faire son portrait. Débute une longue histoire qui aboutit à leur mariage, 10 ans plus tard.
La fortune de son mari permet à Nélie d’assouvir sa passion des œuvres d’art. D’autant qu’Édouard André est lui aussi un grand amateur. Il est co-directeur de la Gazette des Beaux-Arts.
Ensemble, ils parcourent l’Europe et plus particulièrement l’Italie où Nélie peut acquérir des œuvres de primitifs italiens, une période qu’elle apprécie particulièrement
C’est au cours d’un de ces voyages qu’ils achètent la splendide fresque de Tiepolo qui orne de nos jours l’escalier de leur hôtel particulier parisien.
Ils sont également férus d’art français du XVIIIe siècle ou encore de peintures d'École du Nord, dont ils possèdent un chef d’œuvre : les Pèlerins d’Emmaüs de Rembrandt.
Edouard décède en 1894 après treize ans de mariage avec Nélie.
La dame de Chaalis
Avide de découverte et pressée de faire de nouveaux achats, elle entreprend des nouveaux voyages, toujours plus lointains. Après avoir découvert la Turquie, l’Égypte et l’Inde, elle se rend jusqu’en Birmanie. Elle envisage même d’aller jusqu’au Pôle Nord.
Apprenant que l’abbaye de Chaalis, un lieu qu’elle fréquenta dans sa jeunesse, est à vendre, elle interrompt son voyage.
Dans le bateau qui la ramène vers la France, Nélie dessine déjà sa chambre et fait des projets d’aménagement.
Elle acquiert le domaine en 1902 et en fait son musée personnel.
Au rez-de-chaussée, la salle des moines est consacrée aux œuvres du Moyen Âge et à des primitifs italiens dont deux remarquables œuvres de Giotto. Les autres pièces de réception sont ornées dans le goût du XVIIe - XVIIIe siècle avec de superbes meubles Boulle mais aussi des tableaux d’Oudry et de Martin des Batailles et de bien d’autres peintres de cette époque...
Le dernier salon dit « oriental » accueille toutes les œuvres collectées lors de ses voyages au Moyen-Orient et en Extrême-Orient, d’Iran jusqu’en Birmanie et d’Égypte au Pendjab.
Ces salles sont distribuées par une galerie aussi longue que la galerie des glaces de Versailles (73 mètres) mais moins large. Elle est scandée par de splendides bustes antiques, Renaissance et de la période moderne.
À l’étage, desservi par un ascenseur qu’elle fait installer, elle aménage ses appartements où trônent encore des chefs d’œuvres dont un autoportrait de la pastelliste Rosalba Carriera.
Une galerie décorée de portraits en pied dessert les appartements des invités, (anciennes cellules des moines), chacun meublé dans un style différent.
Décédée en 1912, son corps est déposé, selon son souhait, dans la splendide chapelle du domaine, construite sous Saint Louis et dont les fresques ont été peintes à la Renaissance par Primatice.
L’Institut de France, un an seulement après son décès, ouvre les lieux au public.
À une heure de Paris, partez sur les traces de Nélie et découvrez l’abbaye, sa merveilleuse chapelle et les œuvres exceptionnelles de cette collectionneuse hors du commun.
Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site de l'abbaye de Chaalis et du musée Jacquemart-André.